Cameroun :: Marché intérieur du bois :: Contribution de la seconde transformation dans la consommation du bois légal et à la lutte contre les changements climatiques

Au terme de la première phase du projet « promouvoir le bois légal des forêts communautaires et des industriels dans le secteur de la seconde transformation du bois au Cameroun », des avancées ont été enregistrées même si le combat pour la légalité du marché intérieur du bois est encore long.

Le marché intérieur du bois (MIB) légal n’est pas encore une réalité au Cameroun. La fraude et l’exploitation illégale du bois sont prégnantes. La FAO au Cameroun, partenaire technique et financier de la fédération camerounaise des associations et des professionnels de la seconde transformation (Fecaprobois), entend accroître ses efforts pour un bois légal issu des forêts communautaires (FC) et les opérateurs industriels. L’institution salue déjà le travail consenti jusqu’ici puisqu’il a permis entre autres à la fédération d’obtenir un site propre d’exploitation du bois, en attendant sa certification qui tarde à venir. Le processus d’obtention du certificat d’enregistrement en qualité de transformateur de bois (CEQTB) est en cours au même titre que celle de l’attestation de détention de matériel de transformation du bois (ADMTB).

Dans un contexte de changement climatique avéré, Stéphane Sourdin rappelle que la déforestation fait partie des causes de ces changements climatiques. « Cette déforestation, quand elle est faîte de manière illégale, elle devient une grave atteinte au droit des Camerounais de disposer d’un climat qui ne soit ni extrême, ni déréglé », a dit l’attaché de coopération forêts de la délégation de l’Union Européenne au Cameroun.

Technicien des forêts examinant un arbre

Le projet « promouvoir le bois légal des forêts communautaires et des industriels dans le secteur de la seconde transformation du bois au Cameroun », initié du 1er octobre 2020 au 1er septembre 2021, est l’une des réponses à la pression des activités anthropiques sur le couvert forestier. Il a permis d’améliorer le processus d’approvisionnement en bois d’origine légal de la coopérative avec conseil d’administration pour l’exploitation et la transformation du bois au Cameroun (COOP-CA EXTRABOICAM), et d’encourager les autres acteurs du secteur de rejoindre le mouvement. Il a permis de prospecter auprès des forêts communautaires (FC) et les opérateurs industriels, d’après les participants à l’atelier du 31 Août 2021 à Yaoundé et organisé par les 200 membres de la Fecaprobois et ses partenaires. Ici, le challenge est d’amener l’Etat à mettre en place une incitation fiscale de nature à encourager les opérateurs du secteur à militer pour la mise à disposition du bois légal.

Préservation de l’environnement

Le projet s’inscrit en droite ligne des efforts du gouvernement qui a signé les Accords de partenariat volontaires (APV) relatif à l’application des réglementations forestières, à la gouvernance et aux échanges commerciaux (FLEGT) en 2011, dont l’objectif est d’enrayer l’exploitation illégale des forêts au Cameroun. Les acteurs de la société travaillent ainsi en partenariat avec l’Etat afin de consolider le système de vérification de la légalité du bois. Celui-ci vient en outre de présenter le Système Informatique de Gestion des informations Forestières de 2ème génération (SIGIF2) dont l’objectif est de tracer l’origine du bois au Cameroun. « Si on a le courage de se projeter au-delà des intérêts à court terme, et de lire la situation présente de manière stratégique, la déforestation illégale qui gangrène les forêts du Cameroun est en réalité une atteinte grave à la sécurité nationale », a souligné Stéphane Sourdin.

Photo d’ensemble de l’atelier de présentation du rapport d’activité du projet

Les données statistiques indiquent en effets que depuis plus de 10 ans, près de 860 000 mètres cubes de bois ont été sorties des forêts camerounaises du fait des sciages afin de répondre à la demande intérieure. Le rapport d’étude menée par le CIFOR à Douala et Yaoundé en 2016 soutient que « les produits en bois supposément d’origine légale ne représentent qu’entre 12 % et 18 % du volume vendu ».

La sensibilisation des destinataires finaux est en outre l’un des objectifs du projet. Basile Kodjo, Conseiller Fecaprobois, explique que « c’est à travers ce projet que la Fecaprobois a mis sur pied cette coopérative qui va s’occuper uniquement de la mise à disposition du bois légal pour alimenter les entreprises qui font dans la deuxième et la troisième transformation. Si c’est possible, pas seulement pour leurs membres, mais sur l’ensemble du Cameroun pour permettre de sensibiliser les artisans et les petites et moyennes entreprises (Pme) à utiliser le bois légal ».

Un projet, « Essor des transactions de sciages d’origine légale au Cameroun » et financé par l’Union européenne, la Suède et UK Aid à travers le Programme FAO-UE FLEGT, a vu le jour. Il s’appuie sur une expérience conduite par le centre international pour la recherche sur les forêts [Center for International Forestry Research (CIFOR)], le ministère des forêts et de la faune (Minfof), et le Centre de recherche et d’action pour le développement durable (CERAD).

Hervé Ndombong

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Réactions

Stéphane Sourdin, attaché de coopération forêts, Union Européenne

« Il faut qu’on attaque véritablement ce problème d’illégalité »

Pour l’instant le constat qu’on a fait avec le ministère des forêts et de a faune(Minfof) est que l’illégalité est encore beaucoup trop grande. Notre préoccupation est qu’elle porte vraiment atteinte au Trésor public, aux recettes que devrait avoir le pays pour pouvoir se développer. Il faut qu’on attaque véritablement ce problème d’illégalité. L’Union Européenne le fait actuellement dans le cadre de l’appui budgétaire. On essaie d’identifier les gisements de ressources dans le pays ; il y a beaucoup de fraudeurs ; c’est là qu’il faut aller chercher l’argent pour avoir beaucoup plus de ressources pour faire plus de développement.

Bilan pour l’APV-FLEGT 10 ans après

L’APV-FLEGT est accord de partenariat volontaire ; c’est une démarche volontaire du Cameroun qui a voulu s’engager dans cette démarche ; pour passer d’une situation où il y a énormément d’illégalité à une situation de légalité où on respecte la loi forestière. Cela ne se fait pas du jour au lendemain. L’ambition est grande dans l’APV-FLEGT. Il faut du temps. On peut déjà souligner tous les progrès qu’il y a eu. Il y a un dialogue constant qui se fait entre le ministère des forêts, le secteur privé et la société civile, d’une part ; il y a la transparence qui augmente. On a l’ancien projet. C’est un projet d’observation indépendant ; regarder ce qui se passe à droite et à gauche ; on le fait avec les communautés locales, ce n’est pas une chose qui est faite à Yaoundé ; elles sont les parties prenantes et qui vont signaler toutes les irrégularités. Il y a aussi d’autres choses qui se font. Mais on travaille vraiment dans le sens de l’illégalité. On sait que c’est grand défi parce que derrière il y a de grands intérêts.

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Kodjo Basile, Conseiller Fecaprobois

« L’illégalité dans le bois ne nous permet d’être à jour dans les ouvrages que nous fabriquons »

L’illégalité dans le bois ne nous permet d’être à jour dans les ouvrages que nous fabriquons. Avec l’illégalité, nous ne pouvons pas attaquer le marché intérieur. Or, le bois légal est devenu incontournable. Nous avons été confrontés à ce problème. C’est qui a amené la Fecaprobois à mettre sur pied ce projet pour l’accès à la ressource. Pour les entreprises, si vous n’avez pas la matière première, qui doit être de bonne qualité, nous avons pensé que nous devons avoir le bois légal. La mission de la Fecaprobois était donc de s’efforcer de mettre à la disposition de leurs entreprises et de leurs membres l’utilisation du bois légal. Que cela rentre dans nos mœurs.

Nous avons rencontré beaucoup de difficultés. En matière d’approvisionnement, il n’y a pas un marché intérieur du bois disponible. On n’en toujours parlé mais on réalise que vous ne pouvez pas trouver un marché physique de disponibilité du bois. Généralement, pour les transformateur de la seconde ou troisième transformation, la plus que l’on retrouve sur le marché sont des bois de deuxième choix qui ne sont pas de qualité à être appréciés. C’est à travers ce projet que Fecaprobois a mis sur pied cette coopérative qui va s’occuper uniquement de la mise à disposition du bois légal pour alimenter les entreprises qui font dans la deuxième et la troisième transformation. Si c’est possible, pas seulement pour leurs membres, mais sur l’ensemble du Cameroun pour permettre de sensibiliser les artisans et les petites et moyennes entreprises (Pme) à utiliser le bois légal. A un moment donné, au vue de l’évolution, celui qui n’aura pas du bois légal ne se verra pas en train de vendre ses ouvrages. Si vous allez dans les marchés publics, on va arriver à la traçabilité : quand vous n’avez obtenu de papiers, vous n’obtenez pas également de document.

L’autre challenge, puisque nous voulons avoir une licence de transformateur du bois, il faudra qu’on assure d’abord notre approvisionnement. Il est vrai que nous sommes en fin de projet avec la FAO, mais nous pensons que les autres institutions vont nous accompagner pour atteindre nos objectifs.

La fiscalité peut constituer un obstacle pour nous. En fait, dans la chaîne de valeur des entreprises, vous voyez que, lorsque vous allez payer les impôts, au moment où vous fabriquez, vous payer encore les impôts. Le dernier acquéreur, celui qui reçoit ou achète, semble être plus fort. Pour les petites entreprises que nous constituons la plupart du temps, la fiscalité devait être encourageante, apaiser, pour qu’on puisse gagner suffisamment. L’étape de la fabrication tient compte de la transformation à des échelles très importantes. Nous n’avons pas assez de moyen pour le faire. Ce n’est pas un travail de prestation ou phase d’exécution pour atteindre la finalité dans un ouvrage. Il y a plusieurs intervenants dans le processus du produit.

Zangue Etienne, Pca de la Fecaprobois

« La coopérative a déjà fait plusieurs actions en matière d’approvisionnement mais on rencontre beaucoup de difficultés »

A ce jour, la coopérative a déjà fait plusieurs actions en matière d’approvisionnement mais on rencontre beaucoup de difficultés. En réalité, nous ne devrions pas entrer en brousse, nous devrions aller vers un marché pour acheter du bois légal. Seulement, nous sommes obligés d’entrer en brousse auprès des forêts communautaires pour passer des commandes et les suivre. Ceci rend l’approvisionnement très difficile. Aujourd’hui, nous avons moins de 1000m3 du qu’on a mis auprès des coopérateurs depuis trois (03) ans d’existence. Il y a quelques industriels qui nous donnent de temps en temps du bois de bonne qualité, mais l’approvisionnement reste très insuffisant.

Pour contourner ces difficultés, nous souhaitons que les pouvoirs publics réduisent les taxes pour permettre de mettre du bois de bonne qualité à la disposition de la consommation domestique. Les industriels pensent que s’ils nous donnent du bois, ils seront en train de payer les taxes deux fois : pour l’export et vendre localement.

*Notes

La Fecaprobois, association professionnelle, dont le but est de mutualiser les compétences des 200 membres/entreprises qui la constituent, a été créée en 2011 et légalisé en 2012. Son objectif est de valoriser le bois dans « sa nature et toutes ses utilisations ». le Centre, le Sud, l’Est et le Littoral sont les régions déjà acquises au projet en attendant les six autres en cours de prospection.

La coopérative avec conseil d’administration pour l’exploitation et la transformation du bois au Cameroun (COOP-CA EXTRABOICAM) a été créée par la Fecaprobois au lendemain du projet « Appui à l’implication des artisans de la deuxième transformation du bois dans le processus FLEGT et l’organisation du marché intérieur du bois au Cameroun ». Son ambition est de devenir « le leader sur la marché national dans la fourniture des produits finis qui associent à la fois exigences techniques du métier et valeurs de gouvernance forestière ».

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